[Maëlle] Textes

Merci Chantal

C'est toujours aussi bien écrit !

pleins de bisoux
Alex

Bravo.
Je vois rien d'autre à dire. Ton texte est magnifique.
J'ai souris à certain passage, il est tellement vrai ton texte.
C'est super bien tourné, et très bien dit.
Bravo à toi

Merci pour vos commentaires.

Rachel mention particulière, tu m'as fait rougir ^^. Tu ne peux pas imaginer à quel point ton commentaire m'a fait plaisir...
Non je n'écris pas pour Bénabar, mais étant donné que j'aime ses textes, je suis on ne peut plus flatée...si tu peux nous mettre en contact n'hesite pas
Eh vi...on est pas raisonable quand on a 17 ans (Rimbaud)

Tu ris, tu ris...cela dit je relève le défi. Tu viens de me commander mes prochains sujets.
Ca tombe bien, le téléphone a faillit faire un vol planer il y a peu
*fait craquer ses doigts* Mouahahaha
Pour l'autre sujet par contre ça va être plus hard xD délicat délicat, mais soit.

je viens de lire tout tes textes , whhaouuuu !!!
je ne sais pas quoi dire d'autre que bravo , tu m'a beaucoup touché , moi aussi je suis une FAN comme tu les décris si bien , tu mets les mots sur ce qu'on ressent . et pourtant j'ai 10 ans de plus que toi c'est dingue d'avoir une telle réflexion sur la vie a ton age , franchement
le texte qui m'a le plus touché c'est celui des mamans ; moi aussi j'étais émue aux larmes quand ma fille de 5ans m'a réciter son jolie poème qu'elle avait coller sur un coeur et ma petite princesse de 2 ans me dire " bon fète moman " .
je te dis encore bravo et continue comme ca ...

Rachel, c'est marrant que tu cites cette chanson, c'est un de ses meilleurs textes selon moi.
Merci à la maman émue (ça me fait rire, ma maturité prend un coup de vieux flateur quand je passe voir les réponses ici.).

Alors Rachel, comme promis. J'ai commencé juste apres que t'en ai causé, j'ai écrit des idées, puis bizarrement je pense avoir fait le tour du plus gros. Donc voilà ce que j'ai reussi à pondre xD
...
C'est aussi un moyen d'essayer de faire un peu mieux passer mon indisponibilité téléphonique occasionnelle en faisant sourire une autre personne frustrée (autant que moi)...voilà.
(D'ailleurs en lisant "occasionnelle" elle a eu un sourire tout jaune...je le vois d'ici ...elle a raison )

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En France, le premier téléphone portable est apparu en 1992. Avant ça, aux USA dans les années 1980, mais ce à un prix inaccessible pour le quidam moyen.

Il est partout. Tu le verras dans la rue, en marchant, à l’oreille d’un homme en costard, d’une mère de famille, ou d’un collégien surexcité. Il est à tous les feux rouges, il est dans les sacs à main, les poches des jeans ou des vestes. Il a envahi la plupart des existences.

L’acquisition d’un portable nécessite une grande patience. Qui dit portable, dit opérateur. SFR ? Orange ? Bouygues ? Toujours des prix défiant toutes concurrences, avec des tas de conditions à voir en magasin et des astérisques en bas des affiches publicitaires.
Il faut commencer par le choisir. Il est beau, tu préfère les plats ? Les coulissants ? Les noirs ? Les roses ?…Il faut un forfait, se méfier de la voix au bout du fil qui vous fait des coups de pubs, la voix qui fait vendre, et qui en plus coûte plus cher qu’un appel normal.

Fut un temps, un téléphone servait à téléphoner. Aujourd’hui, il immortalise. L’appareil photo est intégré, avec une qualité d’image terrible mais ça on ne nous le dit pas. Il fait vidéo aussi, micro, tous ces gadgets dont on ne se sert qu’une fois. On peut aussi citer le chronomètre et la minuterie. On ne s’en sert que pour voir combien de temps un copain mettra pour traverser une route à cloche pied, ou alors éventuellement, pour la cuisson d’un œuf à la coque. Bref. Les téléphones sont aussi des mp3. C’est bien pratique parfois, on met de la musique dessus mais elle sert peu, puisqu’elle « bouffe » plus de batterie qu’autre chose. La musique sert aux personnes comme moi, qui utilisent l’alarme comme réveil. C’est bien, on se dit qu’une voix ou un riff de guitare apprécié réveillera en douceur, l’humeur sera forcement bonne. On déchante vite : le vibreur sur la table de nuit casse le tout. Le vibreur, très belle invention, c’est plus discret, sauf quand c’est posé sur certaines surfaces. Il y en a des plus silencieux que d’autres, certains évoquent une mouche obèse, d’autres un moucheron anorexique, tout dépend, mais c’est le genre de chose qu’on ne comprend qu’après avoir investi. Toujours est il qu’on a tous plaqué l’insecte sur sa jambe gauche, sous la table, pour être sure que personne n’entendera rien

Le téléphone sert aujourd’hui plus à écrire qu’à appeler, pour beaucoup de victimes en tout cas. Les sms, qui ruinent notre orthographe selon pas mal de profs, ou de parents.
Il y a ceux qui comptent les lettres, qui dépriment parce qu’ils n’arriveront jamais à la fin du mois, puis il y a ceux qui possèdent ce privilège d’être en illimité.
Pourquoi on a inventé ça d’ailleurs ? Le texto, quel utilité ? But scolaire: écrire sous la table c’est plus discret que d’appeler quelqu’un en mettant la tête dans le sac pour ne pas être vu. Ca ne dérange pas, on tombe rarement au mauvais moment…Ca fait toujours plaisir de voir la petite enveloppe sur un coin de l’écran, on peut s’amuser à deviner qui a bien pu penser à nous…Puis notre ego en prend un coup : c’est notre opérateur qui pense à nos finances, et nous propose un petit plus qui changera notre vie. On s’est tous fait avoir, on s’est tous senti seul. Pour certains, ne pas avoir de messages, c’est être « sans amis »... A ça je réponds que je ne suis pas « sans amis » mais que mes amis sont « sans crédit ». Il faut savoir nuancer, puis ça sonne quand même mieux, ils ne sont pas obliger de connaître la vérité sur la longueur de mon répertoire.
Les textos parfois (souvent), ça arrive en retard, où alors on ne les voit pas au bon moment, et ça perd toute sa crédibilité. Les « bonnes nuits ! » reçues le lendemain matin, les « n’oublies pas d’aller au code à 18h », il est 18h02 et tu es devant la télé en tongues…Ca frustre. En plus on a toujours dans nos contacts un imbécile qui a un téléphone qui fonctionne mal : il est donc strictement impossible de lui envoyer quoi que ce soit…

Après, ça nous arrive de téléphoner, quand même, accessoirement. Généralement, le plus dur c’est de s’arrêter. On se promet de ne pas monopoliser sa soirée, puis finalement trop tard. Les quarts d’heures prévus deviennent des heures. Les appels non plus ça ne marche pas toujours d’ailleurs. Il y a les fois où on reçoit un mot sur deux. Celles où on se demande si l’interlocuteur ne nous appelle pas du fond du Léviathan, à côté du capitaine Némo. Puis il y a les autres fois où on parle, on parle, on parle, on conclu par « je ne sais pas ce que toi tu en penses… », Et il n’y a rien qui revient : en réalité ça fait une minute que tu parles tout seul, il n’y a que ta carte SIM pour t’écouter. C’est un grand moment de solitude.
Il y a un répondeur sur un portable. On a tous enregistré notre message d’accueil, plusieurs fois, et on n’est pas satisfait de celui que l’on conserve, en se disant qu’on le refera…un jour. Et ce jour ne vient jamais. Une chose qui me fait rire, c’est ces personnes qui utilises les commandes vocales…tu vois quelqu’un marché, en beuglant « supprimé…supprimé…supprimé !...oui…oui ! ». Franchement les touches c’est tellement plus simples, cela dit je les remercie ces gens, ça me fait sourire à chaque fois.

Il y a ce fond écran qui te sourit et qui te permet de penser à autre chose rien qu’en regardant l’heure. Il y a le secret du code pin, le kit piéton dont on ne se sert pas, le petit câble dans la boîte dont on ne connaîtra jamais l’utilité…

Il y a le soir où l'on remercie cette merveille de la technologie, quand il nous donne l’occasion de lire un mot, la preuve d’une pensée, un « joyeux anniversaire » de quelqu’un auquel on n’aurait pas pensé. Il y a le « bonne nuit », le « Je pense à toi », le « Je t’aime », des petites marques qui pourtant ne sont pas grand-chose, et qui représentent beaucoup, c’est une présence, ça fait sourire ou ça questionne, c’est synonyme de complicité, de soutien, ou alors les deux. C'est un moyen parmis d'autres d'être un peu plus prêt de ces personnes qui sont trop loins.
Puis il y a des jours où l’on voudrait l’envoyer par la fenêtre, parce qu’une fois de plus il nous à fait faux bond…On ne passe pas à l’acte, il peut encore servir, même si sur le moment entre deux jurons, on se dit qu’on paye cher pour rien. On se dit que si on craque maintenant, on n’aura rien à tripoter sous l’arrêt de bus demain. On n’aura plus la chance d’avoir un témoignage d’amitié. On n’aura plus rien dans la poche gauche de notre jeans…et manquer tous ces appels manqués ce serait quand même dommage, surtout quand pour une fois, on a du réseau là où l'on se trouve (enfin...sur une jambe, le bras levé à l'horizontale et la tête en arrière. Mais ça aussi, ça se passe de commentaire).
...
En ce qui me concerne, je change bientôt, pour infidélité trop régulière.

Encore un texte que l'on dévore et on en redemande !!!!

Je ne sais pas à quoi tu te destines mais une chose est sûre, tu devrais essayer l'écriture !!!

Chapeau, c'est toujours bien dit et plein de vérités

Merci pour vos commentaires ^^ Y a pas de quoi.
(J'attends avec angoisse le verdict de Rachel xD)

La productivité...moui ^^ En fait c'est pas du tout les idées qui manque (j'ai un dossier remplit de fichier word juste titré d'une citation où d'un sujet...ils attendent d'être remplis au fur et à mesure...), c'est juste le temps de tout mettre en forme, que ça ait pas l'air trop baclé non plus. En plus vu que certains sujets sont reformulés, raccourcis, ralongés...bref.
Ca devrait être beaucoup plus fréquent dans...2 semaines dirais je ^^ au hasard

Titelle, je comprends oui pour l'oreillette, je l'utilise aussi mais j'entends tellement de personnes qui n'en voient pas l'utilité...je caricature.
Cela dit le problème ne se pose plus, j'ai plus de grandes conversations de 45 minutes, alors comme ça xD

Marie c'est vrai que j'abrège très rarement...non pas que j'ai l'illimité, mais j'écris pas souvent souvent ^^

lol Merci Rachel, je vais y penser. Ca fait plaisir

C'est un peu la chronique Carrie Bradshow de "Sex and the city"...

Sans sexe.. ni city!!!

Mais comparable....

Quel talent maelle! Tu m'as encore bluffé bravo!

comme d'hab' j'adore !!!

Merci

Rachel. Round 2. Grosse tartine j'annonce Oo.

J'ai changé de narrateur, vous remarquerez que ce n'est pas moi malgré quelques points communs. C'est quelqu'un, qu'on ne connait pas mais qu'on a peut être déjà croisé, le quidam moyen.
Voilou...c'est un essai...

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Il est 4h01.
Je me lève, un peu tournant comme d’habitude, c’est un matin comme un autre. Un matin de mai dans un appartement qui est le mien. Je traverse la pièce, pour me diriger vers le frigo, où une bouteille d’eau glacée m’attend. Je referme la porte avec soin, pour ne pas te réveiller. Sur cette porte, il y a les horaires d’ouverture de notre bibliothèque, un magnet de chez Ikea, où tu m’as traîné le week-end dernier, un bon de réduction que tu devais utiliser avant le 12, on est le 24, puis devant ça, bien en évidence, une petite note qui m’a été destinée : « Etre à court de liquide vaisselle ne signifie pas que tu dois t’abstenir de faire la vaisselle, mais plutôt que tu pourrais aller en acheter un autre ! Le nouveau est sous l’évier, il te tend déjà les bras ».
Je souris. Ce mot date de hier matin, et ce qui t’a vexé quelques heures plus tard c’est la remarque que je t’ai faite sur ta façon d’écrire en abrégé…Après réflexion, mon argument était loin d’être recevable, comme tu me l’as fait remarquer avant d’aller bouder sur le canapé devant l’écran plat. Je me souviens d’avoir fait preuve de mutisme, comme à chaque fois que tu as raison et je trouve d’ailleurs que ça arrive trop souvent. Je me suis assis à côté de toi, en gardant une certaine distance. Le silence total, j’ai profité d’une pub ridicule pour essayer de te faire rire, rien y fait. Tu es partie prendre une douche, tu me l’as marmonné. J’ai soupiré, et regardé le début d’un épisode des Experts en jouant avec l’étiquette d’un coussin, comme un gamin honteux d’avoir cassé un vase. Je m’apprêtais à changer de pièce pour aller lire un peu, je suis passé devant un sachet Jules et là l’idée m’est venue, tu as toujours cette habitude de modifier ces slogans. A mon tour. J’ai débouché le stylo que tu as l’habitude de mâchouiller, et sur un post-it d’une couleur différente de la tienne, c'est-à-dire jaune, j’ai écrit « Il parait que les hommes sont idiots… ». J’ai ouvert discrètement la porte de la salle de bain, pour coller mes excuses sur un miroir embué.

Quand je suis ressorti de mon roman, j’ai pu voir que tu dormais, affalée sur le lit. Je voyais encore la lumière de la télé sur le mur d’en face, dans un premier temps je n’ai pas compris pourquoi tu ne l’avais pas éteinte. Ce n’est qu’en prenant la télécommande, que je l’ai su : collée sur le bouton « off », ton écriture impeccable, féminine, terminait mon slogan : « (il paraît) Mais mon idiot sait se faire pardonner. Le mois prochain on achète un lave-vaisselle ».
Je sors de mes souvenirs, je décroche ce post-it et je le jette.

4h04
Je décide de m’installer près de la fenêtre pour savourer mon rafraîchissement, juste à côté de mon bureau. Dessus, mon sac en bandoulière noir, les « Pensées » de Pascal, sous l’intégral de Perec et les poèmes d’Hugo. Tu as raison, je suis bordelique, un peu…d’accord beaucoup. Au milieu de mes feuilles et de mes récits entamés, trône ce livre que je lis actuellement. Pendant que mon crâne semble se craqueler sous l’impact de l’eau froide que je bois trop rapidement en grimaçant comme s’il s’agissait de vodka, mon œil est attiré par une ligne.

« Les amants inventent leur propre vocabulaire, mais il n’a de signification que pour eux. »

C’est ce que Barjavel dit de Viviane et de Merlin. Il a raison…Nous, c’est les post-its et les slogans Jules. Je ramène mes jambes sur le rebord de la fenêtre et je réfléchis en caressant ma bouteille d’un pouce…Si ça ne tenait qu’à ce détail de la veille, non, c’est un ensemble de choses, des regards en coin, une réplique de film vue ensemble…D’ailleurs l’amour c’est quoi ? Je souris en te regardant dormir…si tu entendais mes réflexions matinales tu te moquerais…
C’est un ensemble de premières fois, premier ciné, premier resto, premier concert, premier baiser, première nuit, premier appartement, première étagère…

La première fois qu’on s’est vu, bizarrement non, ce n’était pas un coup de foudre, je n’aurai rien à raconter à mes petits enfants. C’était à un anniversaire en pleine air, d’une connaissance commune, c’est d’un manque d’originalité…je me trouve banal, et toi non. On a discuté, de tout, d’un match de tennis, d’un livre. Tu travailles dans un musée d’art moderne, je ressens encore mes zygomatiques se lever quand tu as commencé à me parler de Magritte avec les yeux qui brillaient. Je t’ai fait rire, et c’est à ce moment là que j’ai compris : je ne veux plus en entendre un autre que celui là. Tu m’as avoué quelques mois après cette rencontre que c’était parce que j’avais su écouter, parce que je parlais de Gauthier avec la même passion, et que tu trouves qu’un homme qui écrit c’est nettement plus attractif qu’un expert comptable. « Tu as trouvé les mots ». Tu m’as avoué le même jour en rougissant, que c’est aussi esthétique…C’est comme ça que tu imaginais Lucas, le personnage de Marc Levy dans « Sept jours pour une éternité ». C’est donc le profil de prof de lettre, écrivain à ses heures perdues, mal rasé, souvent habillé d’une chemise blanche froissé et d’un jeans qui ne vaut pas mieux qui m’a valu cette place de choix. Merci Marc. Je ne comprendrais jamais comment j’ai pu avoir autant de chance.

Je me suis toujours fais le reproche d’avoir manqué d’originalité, tu m’as toujours affirmé que non. Je t’ai prêté ma veste quand il a plu un soir sur les pavés de ma rue. Je t’ai préparé des pâtes le surlendemain, nos principales disputent sont causées par monsieur Propre ou un achat de chaussures impulsif…et non pas à cause d’une secrétaire où de ta mère. Je l’aime ta mère, et j’aime encore plus te voir assise sur le tapis du salon pour l’appeler le mardi soir. Je n’ai pas été rejeté, mais elle ne m’a réellement apprécié que quand elle m’a lu pour la première fois, elle m’a regardé, en disant qu’elle avait compris.
On imagine toujours la réalité plus romancée qu’elle ne l’est. Il y a ceux qui pour leur première nuit voient des pétales de roses dans une chambre d’hôtel, avec une bouteille de champagne, une femme en robe et un homme en smoking, et surtout de la moquette par terre, détail important. Je ne suis pas James Bond. C’était un soir comme un autre, tu n’avais pas la robe mais le jean, je n’avais pas la cravate mais le tee-shirt de l’équipe de basket de la fac, je me souviens que j’ai fixé une étagère dans l’après-midi, et par terre on a du parquet flottant. Depuis, ce tee-shirt trop large est devenu ton pyjama favori, et l’étagère est tombée deux semaines plus tard sous le poids du chat qui n’avait rien demandé à personne. Ca faisait six mois qu’on se connaissait.

Le jour où je t’ai proposé de vivre avec toi, ce n’était pas dans un restaurant chic, mais j’avais bien une cravate, desserrée parce que j’étais un peu nerveux. Je devais aller à un de mes cours, c’était sur une terrasse ensoleillée. Tu me parlais de ta journée, tu parlais et tu parlais encore, je n’osais pas te couper mais je regardais d’un œil ma montre, le verre de limonade était apparemment le seul témoin de mon angoisse. Il est moins dix. Il est moins cinq. Il faut que j’y aille. Oui, j’avais quelque chose à te demander. J’ai pris une grande inspiration, je t’ai posé la question qui m’était venue depuis quelques temps, je suis passé à côté de toi avec un bisou sur la joue en te demandant d’y réfléchir, j’étais en retard. C’était presque fait avec classe, jusqu’à ce qu’arrivé au bout de la place d’un pas rapide, je me rende compte que je t’avais laissé avec l’addition. Je suis donc revenu en courant, j’ai payé le serveur au sourire narquois en le fusillant du regard, pendant que toi, entre deux éclats de rire tu m’as dit que oui, bien sûr, on allait le faire.
A la moitié de ma bouteille d’eau, je ris seul en silence, en me disant que ces situations n’arrivent qu’à moi. Pourtant ça a marché, ça fait un an et demi qu’on se connaît et huit mois qu’on vit ensemble. Il y a eu les premières épreuves, les doutes, les craintes, mais il y a surtout eu les rires et tout ce pourquoi je t’aime.
« Pourquoi tu m’aimes ? », tu me l’as déjà demandé un soir en sortant du cinéma. Je t’ai dit que si je répondais, ma réponse serait trop longue pour que tu en vois la fin et trop courte pour être vraie. Tu n’as pas insisté en souriant et en me demandant ma veste.

Pourquoi je t’aime…on en a des questions. Des éléments me viennent, mais ils ne seront jamais assez explicites pour décrire un sentiment. Jamais.
On aime plusieurs personnes. Quand on demande à un parent : « Pourquoi tu m’aimes ? », il répond « Parce que tu es mon fils, parce que tu es ma fille ». Cela paraît presque être une obligation parfois, en réalité c’est juste le privilège de pouvoir donner une réponse simple et clair. Avec ses amis ou ses amours, on répond « je t’aime…c’est tout », parce qu’il y a mille et une raisons pour lesquels on aime. Quand on cherche ces raisons, qu’on en fait une liste qui possède un début et une fin, c’est qu’on n’« aime » pas, on « apprécie ». Aimer ça ne s’énumère pas : « Quand on aime, on ne compte pas ».
Pour toutes formes d’amour, les raisons ne sont pas forcement celles décrites dans les contes. Oui, c’est parce que tu es gentille, parce que tu es belle, parce que je veux être avec toi, je ne veux rien louper de ton existence, je t’aime au point de me sacrifier…c’est beau, c’est vrai, mais ce n’est pas tout. Je t’aime pour ces matins où tu insultes le réveil, pour ta façon de marcher sur le bord du trottoir, pour ta façon de danser devant un clip. Je t’aime pour ces soirées où tout va mal et où tu as juste besoin d’en parler pour retrouver un sourire, je t’aime pour la soirée du lendemain, quand tu pleures devant le film « Un long dimanche de fiançailles », quand c’est ma chemise qui te sert de mouchoir. Je ne la laisserai à personne ma chemise mouillée. Je t’aime pour ces samedis soir entre amis, où je peux passer mon bras autour de tes épaules quand on en arrive au café. Je t’aime quand je vois quelle fille tu étais à dix-sept ans quand aujourd’hui tu en as treize de plus, je t’aime quand tu boudes, quand tu m’en veux, et que je m’en veux au moins autant. Je t’aime autant quand tu t’assois à côté de mon piano un dimanche matin, pour m’écouter jouer, que pendant une écoute de « With or without you » de U2 un soir de semaine. Je t’aime pour les surnoms débiles qu’on s’est donné, pour cette étagère qui est tombée, pour la moquette qu’on mettra dans notre chambre à couché, et pour le bouquet de fleurs que je t’achèterai demain soir. Je t’aime pour ça, pour un tas d’autres choses que je n’aurai pas le temps de te dire avant d’arrêter de respirer, pour le tout, pour ça et malgré le reste. Les qualités, les défauts, les rires, les larmes, tout ce qui s’opposent et fait de nos existences un paradoxe. Je me risquerai à résumer grossièrement et j’en ai honte, en te disant que je t’aime pour toutes nos premières fois, mais que je t’aime encore plus pour toutes celles qui suivent.

Je ne sais pas le dire, je sais. C’est vaste, je m’en veux de ne pas pouvoir t’expliquer. Les vrais artistes le font. J’aurais voulu voir le sourire d’Elsa devant l’œuvre d’Aragon. Il en a usé du papier pour se déclarer, mais au moins lui, il a bafouillé de belles choses. Il n’y a pas d’amour heureux, mais c’est notre amour à tous deux. De la même manière, quelle a été la tête de l’élue de Patrick Fiori quand elle a écouté « Je ne serai jamais » ? Celle de madame Aznavour, avec « Sur ma vie » ? On ne s’en remet pas de ces mots…on les garde et on se sent petit.

Quand on aime on se sent bête, parce qu’on sait pourquoi sans savoir, et en plus on a peu de temps pour essayer de le dire. Tout le monde le sait, quand on est avec une personne qu’on aime, on voit toujours la fin venir plus vite que le début, on se fait le reproche de n’avoir pas pu bloquer l’aiguille de notre cadran. On ne dira « tu me manques » que de temps en temps. La vérité, et elle ne vient pas de moi, c’est que dès que ces personnes ne sont pas à côté, elles sont déjà trop loin. L’amour c’est un lien que tu manipule avec le plus grand soin, parce que là où l’on voudrait qu’il ait la rigidité du marbre il a la fragilité du cristal.


4h27
Ma bouteille est vide et je ne suis absolument pas satisfait de ma définition. Tu ne l’auras jamais je crois, je suis frustré. De toute façon je n’arriverai pas à me rendormir, je vais aller faire un tour.


4h28
J’ai enfilé une chemise blanche et ma veste. Dans la poche intérieure gauche, contre mes côtes, il y a cette bosse depuis trois jours. Une boîte carrée, du velours bleu marine, petite chose qui représenterait notre futur commun. Je n’hésite pas, mais je ne sais pas comment m’y prendre. Aragon il l’aurait déjà fait lui.


4h29
Je referme la porte d’entrée, mais avant ça, par l’entrebâillement, je t’observe. Déjà un an et demi. C’est passé à une vitesse terrible, des tas de choses reviennent en y repensant et on s’en veux pour des détails qui s’effacent, on lutte contre certains oublis. Ce n’est pas grave, on s’en fabriquera d’autres des souvenirs, mais je voudrais être sûr qu’on ait les mêmes pour les années qui viendront.
En attendant, à cette heure ci j’ai déjà bien réfléchi, et toi tu ne te doutes de rien, inconsciente totale dont les épaules se soulèvent à rythme régulier, tu rêves et peut être même pas de moi. C’est vrai que quand Kevin Costner fixe une étagère elle doit forcement tenir.


4h30
J’ai fermé la porte.
Aimer c’est peut-être juste quelque chose d’indispensable. C’est peut-être dire que je ne veux pas ouvrir les yeux si tu ne fais pas partie du tableau qui représente ma vie. C’est comme si on enlevait Mona Lisa au tableau de Léonard de Vinci, comme si tu enlevais les chapeaux melons à Magritte et le cubisme à Picasso : il resterait des belles choses qu’on reconnaîtrait, mais il manquerait le plus important.
Peut être...je ne sais pas.


On dit que lorsque l'on rencontre l'amour de sa vie le temps s'arrête... Et bien c'est vrai. Ce qu'on ne dit pas c'est que quand le temps reprend son cours il file à une vitesse folle pour rattraper son retard.
(Ewan McGregor - Big Fish)